Alors comme Nana, pour ma part je pense que ça dépend.
Perso, je pense que ça dépend quel type de présence a le personnage, et la façon dont on le présente.
A force de lire et d'écouter des concerné.es sur le sujet, j'en suis venue à cette conclusion.
Je détaille du coup.
Tout d'abord, une notion qui me parait importante : ce n'est pas à moi de raconter certaines histoires. Je ne suis pas la mieux placée pour raconter certaines choses, et en le faisant je volerai la place de concerné.es qui n'auraient donc pas voix au chapitre (le classique édito "oh bah on a déjà une histoire de racisme nous, comment ça c'est écrit par un blanc et vous êtes concerné.es ? Bah on s'en fout").
Donc, ce faisant, amha non, quand on est blanc, on ne peut pas mettre un personnage racisé pour raconter l'expérience des racisé.es (racisme, culture, etc...).
Je mets ici un comics que je trouve cool sur le sujet :
En prime, je vois aussi de plus en plus évoqué le fait que la culture dominante blanche est telle qu'on a pas de référence de vie de persos racisés.
Donc, quand on se met à se prendre à parler d'une culture qui n'est pas la notre, par exemple, on le fait souvent plutôt mal, faute de connaissance, d'immersion dans la culture.
Oui, on peut faire un travail de recherche solide pour mitiger cette faille.
Oui, on peut faire du sensitivy reading, aussi.
Mais rien ne remplacera jamais toutes les subtilités d'avoir grandi et vécu dans une culture. Toutes ces petites choses du quotidien et de la culture qui sont tellement évidente qu'on ne le met pas dans un livre sur la culture. Tout ce qui imbibe notre rapport au monde, à la famille, aux aventures, à la façon, même, de raconter des histoires.
Quand je lis de telles histoires écrites par des blancs, comparé à mes lectures ownvoice, c'est incomparable. Dans le premier cas c'est... au mieux documenté, au pire un basique "mon perso est racisé, mais en vrai je l'ai fait culturellement blanc avec la peau noire". Dans le second, la culture infuse le texte. Ca s'invente pas, je crois.
Donc, là encore, mais je sais qu'ici c'est plus personnel, je ne mettrai pas un perso racisé point de vue principal dont il faudrait aborder la vision du monde et ses habitudes culturelles. Je le ferais forcément mal.
D'ailleurs, je l'ai mal fait. J'ai écris une héroïne asiatique qui n'a d'asiatique que son nom et ses traits. L'aventure prend le dessus, dans du space op on peut imaginer un melting pot culturel qui efface la culture asiatique, et ce n'est pas si grave au fond car l'histoire ne se focalise pas sur sa culture. Mais voilà, je me rends compte, avec le recul, qu'elle est en réalité blanche dans son écriture et que je lui ai juste donné un nom asiatique.
Donc, il reste quoi ?
Eh bien comme Nana.
Les être humains racisés existent. Iels vivent des choses qui ne sont pas toujours en lien avec leur culture et leur oppression.
Et là, moi autrice blanche, je peux jouer ma part.
En mettant des persos racisés un peu partout dans mes histoires.
Qui vivent des aventures.
Qui font des métiers cools.
Qui sont des persos positifs qui ne tombent pas dans les tropes dommageables (le perso noir qui meurt en premier, le perso noir magique, le perso noir qui sacrifie tout pour soutenir le héros blanc... you name it).
Tant qu'ils ne sont pas point de vue dans mon histoire, je le ferai.
Mais cela dit, rien que ça, il y a énormément de façons de se foirer en propageant des tropes négatifs et dommageables. Alors imaginez tout un roman sur un perso racisé et sa culture quand on ne l'est pas...
Mais en vrai, on a surtout besoin de donner de la place aux auteurices racisées pour qu'iels racontent leurs histoires (en lien ou non avec leur culture). Et prendre leur place en écrivant ces histoires et ces cultures à leur place ne va pas les y aider.